Chronique de Kodjo Epou : Quand c’est Faure, il faut toujours attendre le 36 du mois.


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Parmi les chefs d’états réunis la semaine dernière à Accra pour le sommet de la CEDEAO, aucun d’eux, excepté celui du Togo, n’a accédé au pouvoir par le carnage. Paradoxalement, il s’est trouvé que le président sur la conscience duquel pèse le tas le plus élevé de cadavres et qui devrait par conséquent se faire plus discret, est plutôt celui qui fait échouer un protocole d’accord pour la limitation des mandats présidentiels dans l’espace ouest-africain.
 
Le putschiste bon teint a définitivement confirmé qu’il veut s’accrocher à vie au pouvoir et n’a nulle intention d’abandonner de sitôt. Ni en 2020 ni en 2025. Or, dans les colonnes de “l’hebdomadaire des palais présidentiels” communément appelé “Jeune Afrique”, le même président affirmait, il y a seulement quelques semaines, qu’il ne cherche pas à s’éterniser au pouvoir. Quel respect mérite Faure Gnassingbé? Qui pourra parler d’insulte ou d’ « atteinte à la réputation du président de la république» si un Togolais déclare ne voir en Faure Gnassingbé qu’un vulgaire menteur digne de mépris ou un inceste fabulateur digne d’être pendu haut et court ?
 
De source digne de foi, ici à Washington, on apprend qu’il était question, après la signature du protocole de limitation des mandats, qu’une délégation de la CEDEAO sous l’égide du Sénégalais Macky Sall se rende dans les jours suivants à Lomé pour signifier formellement au chef de l’état togolais, échéancier à main, la nécessité pour lui de considérer son troisième mandat comme le dernier qui devra être un quinquennat de transition devant aboutir à un changement de régime en 2020. Seulement, comme tout malfaiteur, notre président a le flair que seuls les chiens possèdent? Faure aurait eu vent du plan de l’organisation régionale. Il se trouve qu’il nourrit une forte méfiance vis-à-vis de son homologue sénégalais fraîchement porté à la tête de la CEDEAO, un Macky Sall qui n’a jamais gobé les penchants monarchiques et totalitaires des Gnassingbé. Cela a toujours irrité Lomé. La peur maladive que le terme flou “rétroactif” a crée ces derniers temps dans l’esprit mouvant du prince a fait le reste. D’où le niet de l’autocrate de Lomé qui a préféré, à Accra, jeter par terre le visage de son pays en s’associant avec le grossier marabout gambien de Banjul pour opposer une fin de non-recevoir à ce protocole d’accord qui aurait pu permettre à la CEDEAO de grandir, de prendre une avance considérable sur les autres régions du continent en matière de démocratie.
 
Les éternels neuneus qui, au Togo comme dans la diaspora, prennent Faure pour un vrai leader à qui il faut continuellement accorder le bénéfice du doute sont servis: la nouvelle commission sur les réformes confiées à grand renfort publicitaire à Awa Nana va, à l’instar de la CVJR du prélat Barrigah, finir elle aussi dans les tiroirs du prince omnipotent. Rares sont les Togolais qui croient réellement à la parole de celui qui prétend les diriger. La question est alors de savoir si on doit accorder une quelconque crédibilité à une élection organisée sous la veille de celui qui mitraille à tous vents l’esprit du consensus et dont les actions de tous les jours, totalement opposées à ses discours, confinent au dernier rang l’intérêt du grand public. S’il faut s’en tenir seulement aux élections comme moyen d’organiser régulièrement des mouvements de personnes à la tête de l’état togolais ou de renouveler le leadership national, le résultat restera celui qui a été présenté à la face du monde, dans une confusion gigantesque, pendant la honteuse farce du 25 avril dernier. Ce sera les mêmes proclamations à la dérobée, les mêmes investitures impudiques, à huis clos, sans invités de marque, les mêmes kidnappings de la vérité. Ce spectre dosé de fraudes et de violence tous azimuts laisse aux Togolais très peu de choix.
 
Il faut admettre que c’est à cause de l’absence d’une force équivalente dans le camp d’en face que le pouvoir et ses troufions se permettent de faire usage de tous les excès avec aise jubilante. Ce sera juste et patriotique d’envisager une parade suffisamment forte capable de contraindre le régime à changer d’attitude car, après qu’elle a tout essayé et tout perdu, y compris sa crédibilité, l’opposition doit concevoir l’espoir du changement à travers une revanche à la dimension des humiliations qu’elle endure depuis des décennies. Pour dire les choses telles qu’elles sont, les Togolais sont condamnés à chercher leur liberté à travers la violence. Déjà dans leurs esprits, tous rêvent secrètement qu’émerge, enfin, un brave homme à l’instar de ce soldat anglais du 16ème siècle qui, n’en pouvant plus de supporter la tyrannie que faisait peser le roi sur son peuple, un jour, s’écria: “allons-y chercher la paix à travers la guerre”.
 
L’histoire enseigne que la non-violence n’aurait pas arrêté la “campagne de purification” d’Adolf Hitler. Elle n’aurait pas permis de déverrouiller, en Roumanie, le régime de plomb du couple Nicolae et Elena Ceausescu. Les dialogues dociles, les meetings accommodants et les marches aux itinéraires arrangées n’auraient pas suffi non plus à convaincre les racistes blancs à desserrer l’étau de l’apartheid en Afrique du Sud. Ce ne sont donc pas les tables rondes intercalées d’élections à un tour fraudées d’avance auxquels les togolais assistent qui vont endiguer l’état de siège que fait peser la dynastie Gnassingbé sur notre peuple.
 
La dernière réélection de Faure Gnassingbé est comique. Elle n’arrange rien. C’est, à la limite, une abomination qui plonge davantage le pays dans un climat social infecte où tous les esprits sont surchargés de violence. Naturellement, les tenants du pouvoir obscurantiste verront dans la ligne du talion une option subversive et irresponsable. Parce que l’idée de mettre fin aux cauchemars du peuple en provoquant des cauchemars de grande envergure chez le RPT/UNIR est une menace pour leur zone de confort. Parce qu’ils préfèrent que la situation reste en l’état, que les expéditions policières des hommes de Yark sur les paisibles citoyens perdurent, afin qu’ils savourent, cyniquement, la violence à sens unique qui maintient le statu quo et restreint les libertés civiques.
 
Ce qui s’est passé à Accra quand monsieur Gnassingbé a évoqué la non-conformité du projet communautaire avec la constitution en vigueur dans son pays prouve, s’il en est encore besoin, que les Togolais ont affaire à un système de dégénération de la république au profit d’une dynastie familiale qui ne veut pas dire son nom. C’est d’une révolution soudaine et brutale de type roumain qu’il faut si l’on veut vraiment déverrouiller son système. Malheureusement, le Togo souffre d’un manque cruel d’HOMMES alors que, année après année, la démocratie pour laquelle beaucoup de citoyens ordinaires ont sacrifié leurs vies s’éloigne, laissant place à un état policier violent qui paupérise les masses populaires pour mieux les assujettir. Dès lors, une attitude pacifiste apparaît comme une simple vue de l’esprit, sans aucun rapport avec l’histoire des peuples opprimés qui ont réussi à s’affranchir des fers de l’oppression.
 
Source : [24/05/2015] Kodjo Epou, Washington DC, USA
 

Les + Commentés 1

  1. Barkissa says:

    Du farfelu Eyadema au minable emigo de Essozimna: il ya aucune dignité, dire quelque chose et la respecter cela n’a jamais existé chez ces cochons-hommes. Ce sont des cochons à la forme humaine.

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