Le point de Kodjo Epou : Rien pour nourrir un intérêt chez nous en Afrique!


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photo | Le nouveau président de la France, Emmanuel Macron / Le Parisien


Le nouveau président français, Emmanuel Macron, va-t-il pratiquer une politique africaine de la France loin des réseaux de connivence comme il le dit et mener sur le continent une politique cohérente qui respecte la volonté des peuples? Peut-il, dans les pays où la démocratie n’existe pas, se ranger du côté des forces progressistes qui se battent encore pour l’établir ? Rien n’est moins sûr.
 
Le « rebelle » de la gauche française fraîchement élu a promis, pendant sa campagne, de rompre, avec les usages inacceptables de la Françafrique, de ne pas cautionner les élections frauduleuses sur le continent. En regardant le nouveau président, considéré comme un roseau d’acier, un mou pressé qui ne porte pas le poids moral de l’ère mitterrandienne et de ses pénibles compromissions africaines, on a envie de le croire. Sachant que le tempérament d’une personne fait sa destinée. Cette loi s’applique aussi aux présidents: leurs lignes de force et de faiblesse, leur style, la manière dont ils exerceront la haute fonction qui leur échoit sont déjà en eux. Le fil conducteur de leur action est dans leur histoire d’avant la consécration. Seulement, le pouvoir suprême, transforme. Au bout de quelques mois, il n’est plus le même homme. On peut dire, sur cette base, qu’on ne connaît pas un homme politique tant qu’on ne l’a pas vu dans l’exercice du pouvoir. Macron, fera-t-il mieux en Afrique que ses prédécesseurs?
 
Au-delà de la personnalité du locataire de l’Élysée, il reste évident que les Africains ne doivent pas attendre d’un Français de déterminer leur destin. C’est aux Africains de tuer la Françafrique. Il leur faut, pour cela, s’approprier cette célèbre phrase de Barack Obama : « Nous sommes nous-mêmes ceux que nous attendons ». Mais, tant que les hommes et les femmes noirs ne se décideront pas à prendre en main leur destin, la démocratie restera, en Afrique, une démocratie des coups d’état constitutionnels, de l’impunité, des clans dominateurs, des marchés publics complaisants, des successions monarchiques, d’une justice du double standard, des gaz lacrymogènes. Au total, une démocratie où des nations entières, dépouillées de leurs oripeaux, de leur dignité, seront toujours contraintes de négocier leur survie avec leurs fossoyeurs, au lieu de les voir en prison.
 
A défaut d’avoir une démocratie à l’africaine, une d’authentique qui marche, ce n’est pas une honte de copier avec intelligence et rigueur le genre qui fonctionne chez “nos maîtres”, laquelle fait d’eux ces puissants qui nous dominent : en France, les crises sont contenues par les lois, par les institutions. L’administration est au service du citoyen. Le juge fait son travail sans attendre que l’ordre lui vienne d’en-haut. On vote et, sur les lieux de l’opération, on dépouille les bulletins, comme l’exige la loi. Une loi à laquelle sont assujettis autant les voyous, les repris de justice que les hommes politiques. Ces derniers sont même les plus ciblés pour la simple raison qu’ils sont supposés donner l’exemple d’une probité sans faille. Personne n’y échappe, tout le monde est logé à la même enseigne.
 
En Afrique, pour des raisons qu’en réalité rien n’explique, les lois sont régies par les états d’âme, les trafics d’influence, la force des armes, pendant que les administrations, fortement tribalisées, fonctionnent contre les citoyens, au verso du mérite. Ce sont bien ces désordres organisés, ajoutés à l’immobilisme, à l’incapacité presque maladive des dirigeants à penser en profondeur l’avenir du continent, qui font le lit de la Françafrique. Comme si l’Afrique n’a pas assez mal, ses oppositions, elles qui sont habilitées à conjurer le péril, n’en finissent pas de se perdre dans les conflits d’intérêts, dans les divisions, parfois dans les collaborations discrètes et trop souvent dans la course aux lucres. Les incessantes allées et venues de certains opposants, grands énarques compris, ferment gaillardement la marche de l’indignité et de la dépendance.
 
A sa prise de fonction, Emmanuel Macron verra que “ la France sans l’Afrique, c’est comme un véhicule sans carburant ”. Après qu’il aura parcouru les livres que lui tendra Hollande pendant la passation de pouvoir, le nouvel élu ne se verra plus pressé d’abolir les dispositifs mis en place par ses prédécesseurs, si l’on sait aussi qu’un président de la République française a pour mission première la défense des intérêts de la France, lesquels intérêts l’ancien colonisateur trouve en abondance au Sud du Sahara, de Libreville à Abidjan, de Lomé à Brazzaville en passant par Yaoundé, Kinshasa, Bamako, Dakar … Un président français sera et restera l’agent commercial numéro un des groupes français, pour mettre la main sur les marchés juteux dans ses anciennes colonies. C’est de bonne guerre! C’est ce que, pour la plupart, les chefs d’État africains ne savent pas faire. Ou, les rares fois qu’ils s’y essayent, c’est pour viser prioritairement des pots de vin. Dans le meilleur des cas, Macron pourra, sans les effacer totalement, déplacer quelques lignes.
Kodjo Epou
 
On peut, raisonnablement, douter que le jeune président et ses camarades du tout nouveau parti politique Social-Libéral français résistent pour longtemps à la capacité de manipulation des palais africains, pour terrasser les hydres qui y règnent sans partage. Il va falloir que les Africains attendent encore un peu pour voir si la victoire du leader de « En Marche (EM) » marquera la fin de la Françafrique. C’est le minimum que sont en droit d’attendre de Macron les francophobes indignés qui se comptent par millions sur le continent.
 
Kodjo Epou
Washington DC

USA
 
lomévi (www.togoactualite.com)
 

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