Togo et ses mascarades électorales, le fruit est présentable mais l’intérieur est pourri.


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serment faureLes conditions actuelles d’organisation des élections au Togo ne permettront certainement pas une possibilité de victoire de l’opposition. Aucune alternance n’est donc possible. Et ce pour plusieurs raisons.
 
Le contexte dans lequel ces élections sont à chaque fois organisées est totalement vicié et à l’avantage du régime cinquantenaire au pouvoir.
 
Sur le plan institutionnel, la cour constitutionnelle composée de 9 personnes est l’organe suprême de recours en cas de contentieux et de proclamation des résultats définitifs. De par sa composition inéquitable cette cour est un instrument au service de l’exécutif. Deux petits exemples parmi tant d’autres pour l’illustrer :
 
En 2013 lors de l’élection législative, la Cour constitutionnelle valide une liste du parti au pouvoir contenant le nom du président en exercice d’un autre parti politique. Ce qui est contraire à la loi.
 
En 2015, pour l’élection présidentielle, le Parti des Togolais introduit une saisine pour un contentieux pré-électoral, la Cour constitutionnelle décide que la saisine est irrecevable au motif que le Président dudit parti n’est pas candidat à cette l’élection. Comme si un contentieux ne peut surgir qu’après le dépôt des candidatures. Alors même que cette cour statut au nom des citoyens et donc du peuple togolais. Cette institution connait-elle la valeur et le poids du peuple au nom duquel elle rend des arrêts à tort et à travers ?
 
Autre organe non moins important sollicité dans l’organisation des élections, la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), avec un profil politique au détriment d’une Céni technique. Elle organise, supervise et proclame les résultats provisoires. Composée de 17 membres dont 12 sont issus ou proches du parti au pouvoir. En cas de non consensus sur un sujet, les décisions sont prises au vote et à la majorité. Dans ces conditions jamais une décision en faveur de l’opposition ne peut être prise.
 
On ne peut ne pas évoquer le Ministère de l’Administration Territoriale et des Collectivités locales qui à tendance à supplanter la Céni, ce ministère impose à la Commission électorale un expert qui a la haute main sur le système informatique et dont personne ne connait la mission réelle. Cette Céni non seulement politisée à outrance ne jouit d’aucune indépendance vis à vis du pouvoir en place.
 
Le cas de l’administration est illustratif d’un processus bancale et surtout inéquitable. Avec les moyens de l’Etat, les hauts cadres de l’Administration, les préfets, les maires nommés par l’exécutif, les Directeurs Généraux et les cadres des sociétés d’Etat, les chefs de canton et de village, et même certains membres des forces de sécurité et de défense sont mis à contribution pour faire campagne pour le parti au pouvoir, en violation de toutes les règles.
 
Autre élément non négligeable, le Fichier électoral. Le rapport de l’Organisation Internationale de la Francophonie qui est intervenue sur le fichier électoral révèle que 75% des électeurs ont été inscrits sans pièce d’identité, ni même acte de naissance, mais uniquement sur témoignage des chefs traditionnels que l’on sait largement tenus par le pouvoir. Dans une terminologie diplomatique feutrée l’OIF a qualifié ce fichier de ‘’non parfait’’.
 
Le découpage électoral reste une pièce importante du puzzle électoral. L’absurdité du découpage électorale fait que, à un député correspond une population dont le nombre varie du simple au double selon que les circonscriptions sont favorables ou non au parti au pouvoir. Au Togo la terre aussi vote, le bon sens consacré par la formule one man, one vote relève de l’illusion en matière électorale au Togo.
 
Cerise sur le gâteau, les dernières élections locales au Togo remontent en 1981 soit 34 ans. Le régime en place ne veut pas des locales pour des raisons évidentes et continue de jouer aux dilatoires reléguant aux calendes grecques ces joutes importantes dans la mise en œuvre de la politique décentralisée signe d’une bonne santé de la démocratie à la base. Les maires sont nommés et estampillés, président de délégation spéciale.
 
Chacun des points ci-dessus constituent des facteurs qui biaisent considérablement le processus électoral en faveur de la famille Gnassingbé et en l’espèce de monsieur Faure Gnassingbé, candidat du parti au pouvoir.
 
Lorsque l’on ajoute à tout cela des pratiques d’intimidation, de menace, de pression, d’utilisation sans contrôle des moyens de l’état et d’achat de conscience, on comprend bien que le régime s’évertue à obtenir une élection dans le calme, ce à quoi les populations adhèrent aisément compte tenu des traumatismes passés.
 
En effet, lorsque l’on considère les violences qui émaillent généralement les élections au Togo, avec les tueries de la lagune de Bè et les 500 morts reconnus par l’ONU en 2005 par exemple, le caractère non violent devient le critère principal d’appréciation des élections au Togo.
 
Ainsi, l’élection présidentielle du 25 avril 2015 vient de proclamer la victoire du président sortant qui entreprend son troisième mandat de 5 années. De certains observateurs locaux à ceux venant de l’extérieur, des organisations sous régionales et continentales jusqu’à l’Organisation des Nations Unies, tous expriment de manière unanime une satisfaction du déroulement, notamment parce que tout s’est essentiellement déroulé sans violence majeure.
 
Il faut le reconnaitre, le régime togolais a su polir son image à l’extérieur grâce à un recours intense aux lobbyistes et une communication massive sur fond de liftings médiatiques basée sur le nouveau quai du port de Lomé, la nouvelle aérogare dont on attend toujours la fin des travaux et les 100 km de routes bitumées en 10 ans d’exercice du pouvoir.
 
Mais lorsque l’on considère les points relevés, peut-on raisonnablement dire que l’élection présidentielle du 25 avril 2015 a été organisée selon les règles démocratiques ?
 
Que doit faire l’opposition pour un jour espérer gagner une élection, voire obtenir l’alternance ?
 
Au minimum, l’opposition devra s’organiser pour obtenir certains points d’amélioration du processus électoral, notamment :
 
les réformes constitutionnelles et institutionnelles
la révision du Code électoral
la constitution de l’état civil
la refonte du fichier électoral
la structure de désignation de membre de la Cour constitutionnelle
la mise en place d’une CENI technique.
 
L’opposition ne devrait plus accepter le déroulement d’une nouvelle élection sans avoir obtenu les points d’amélioration relevés.
 
Sans l’obtention d’un cadre normatif gage d’élections sur des bases démocratiques, les mêmes causes produiront les mêmes effets. Que l’opposition continue à accompagner le régime togolais dans des mascarades aux résultats connus revient à faire le jeu du pouvoir contre les aspirations du peuple souverain et comme tel, cette opposition doit arrêter l’hémorragie et revoir les dégâts occasionnés pour repenser la lutte pour l’alternance si tant est que les forces se réclamant du changement sont réellement en lutte pour l’alternance.
 
source : Fabbi Kouassi
 

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