L’organisation des élections municipales dont les dernières remontent à 32 ans a suscité une pléthore de candidature sur l’ensemble du territoire. De l’Opposition à UNIR en passant par les indépendants –UNIR, ils sont des centaines à se lancer à l’assaut des municipalités. C’est aussi l’occasion pour certains députés d’UNIR de se lancer dans la conquête de certaines municipalités dans l’optique des cumuls de mandat. Dans la Préfecture d’Agou, la candidature du député et demi-frère de Faure Gnassingbé suscite quelques remous au sein des populations.
Patrick Bolouvi une candidature mal perçue à Agou
Patrick Bolouvi n’est plus un homme à présenter, demi-frère de Faure Gnassingbé, il a été abondamment cité dans le scandale de Bolloré. Il voulait se faire élire député à Tsévié sa ville d’origine mais face à l’hostilité des siens, son frère président préféra le parachuter à Agou la ville de sa mère où il est un parfait inconnu. En l’absence de l’opposition qui a boycotté la mascarade électorale du 20 décembre 2018, son élection n’aura été qu’une simple formalité. Faute d’électeurs puisque, le boycott lancé par la C14 était massif, il a suffi de bourrer les urnes et le tour était joué. C’est par ces tours de passe-passe il s’est fait « nommé » député dans la localité de sa mère. Il promet de changer le visage de la préfecture dans tous les domaines alors que pendant les trois mandats de son frère de président aucune réalisation n’a été faite en termes d’infrastructures de développement. Faut-il le rappeler, la préfecture d’Agou a toujours voté massivement pour l’opposition UFC dans le temps sous Gnassingbé Eyadema et ANC sous Faure Gnassingbé.
L’électorat RPT-UNIR dans cette zone oscille entre 9 et 12% un faible encrage souvent compensé par des fraudes électorales. Alors avec l’arrivée de Faure Gnassingbé dont la mère serait originaire d’Agou, certains cadres du milieu proches d’UNIR se sont vu poussés des ailes. Pour rallier les populations à la cause d’UNIR, ils mettaient en avant Faure Gnassingbé le « neveu » dont l’arrivée au pouvoir va changer radicalement le visage de la préfecture. Sauf qu’en 15 ans de règne le neveu n’a pratiquement rien fait pour la préfecture de sa mère en dehors de son palais de campagne. Son oncle Sylvestre Mensah entre temps député de la localité n’a pas non plus fait grand-chose. Du coup lorsqu’ un certain Patrick Bolouvi vient à son tour promettre un lendemain meilleur aux populations qu’ils exploitent comme du bétail électoral depuis 15 ans, il y a des raisons pour elles de ne plus y croire.
Un découpage inique et complaisant
Les populations rencontrées sur le terrain nous renseignent que la préfecture d’Agou compte 13 cantons et un village autonome. L’ensemble est divisé en communes par un découpage bizarre et complaisant aux yeux de ces populations. Elles ne comprennent pas pourquoi 10 cantons et le village autonome constitue Agou 1 la première commune où le demi-frère de Faure Gnassingbé est candidat et Agou 2 qui ne compte que 3 cantons. Tout a été taillé sur mesure pour permettre à UNIR de mette la main sur la plus grande zone de la préfecture. Et ce n’est pas les points focaux de ce parti qui le démentiront puisqu’il y a quelques jours, dans une réunion à huis clos dans le canton d’Atavié, un des responsables s’en est réjoui en disant clairement qu’ils vont mettre la main sur toute la préfecture en d’autres termes après la députation, il ne leur reste qu’à prendre la mairie.
C’est donc en conquérant et triomphant que Patric Bolouvi s’est emmené le 14 juin dernier jour de début de la campagne à Agou suscitant la curiosité des populations. Il avait donné rendez-vous aux chefstraditionnels de la localité pour leur présenter les candidats de la listes Unir, une autre aberration. Convoqués à 10h les chefs ont dû attendre jusqu’ à 13 heures avant de voir apparaitre le super député arrivé avec un imposant cortège avec un motard devant, une sirène et un gyrophare. A quel titre le demi-frère de Faure Gnassingbé fut-il député se déplace avec motard, gyrophare et sirène ? A cette allure le futur député-maire va créer sa république autonome d’Agou en attendant de viser plus loin.
Agou un désert d’infrastructures de base
La préfecture d’Agou est essentiellement agricole et possède des potentialités énormes. Une zone montagneuse avec un climat agréable. On y produit des avocats, des mangues, des bananes et d’autres fruits en grande quantités. Les paysans éprouvent toutes les difficultés convoyés ces produits des zones de production vers les marchés faute d’infrastructures adéquates. En dehors de la route Lomé-Kpalimé qui traverse la ville, Agou ne dispose d’aucune route secondaire ni bitumé ni pavé. En 2010 lors de la campagne électorale Faure Gnassingbé a promis bitumer la route Agou-Nyitoe-frontière Ghana et la route Agou-Notsé. Neuf ans après cette promesse présidentielle dans la ville de sa mère, les populations de la localité attendent toujours le début des travaux. En 2014, à la veille de la présidentielle le même neveu a fait de nouvelles promesses alors que les anciennes n’ont jamais connu un début d’exécution. Flanqués de soi-disant investisseurs malaisiens Faure Gnassingbé a promis une nouvelle plantation de palmeraie avec au bout de la chaine la construction d’une usine de transformation en huile rouge.
Depuis bientôt 5 ans ni palmeraie ni l’usine ne sont sorties de terre. Pire des individus à l’allure d’escrocs ont fait venir des jeunes plants de palmier qu’ils tentent de vendre à 2500 f cfa le plant aux paysans. Un prix exorbitant pour ceux-ci qui peinent déjà à joindre les deux bouts. Il n’existe à Agou aucune école professionnelle ou centre de formation. La majorité de écoles datent de l’époque coloniale et d’autres sont toujours sous les paillottes. Il n’existe non plus aucune usine de transformation des fruits et des produits agricoles abondamment cultivés dans la localité. Les bureaux de la préfecture sont dans un bâtiment exigu et délabré qui ne choque personne. Pour l’électricité c’est encore un long chemin. Il y a quelques mois, il a fallu un deuil dans la famille présidentielle pour qu’on se précipite à électrifier quelques rues conduisant au lieu du deuil. Lorsqu’ il y a des orages Agou jusqu’à Tovegan est souvent plongé dans le noir pendant des heures. La seule réalisation à mettre à l’actif du régime à Agou une préfecture totalement abandonnée c’est le marché.
C’est au vu de toute cette situation, ces promesses non tenues et ce sentiment de se faire utiliser ou manipuler pendant la campagne électorale que les populations et certains cadres de la localité dénoncent cette candidature de Patrick Boulouvi à la mairie, un homme selon eux qui n’a aucune connaissance profonde de la préfecture.
Pierre C.
source : Liberté