Le ministre togolais des affaires étrangères Robert Dussey accueille, depuis quelques jours, son homologue allemand de la Coopération et du Développement. À l’étape togolaise de sa visite sous-régionale, Gerd Muller a, au nom de son pays fait don des respirateurs au Togo. Un geste salutaire de Berlin mais qui lève le voile sur une des faiblesses de la gouvernance du régime cinquantenaire.
Respirateurs et oxymètres…
Après le Centre hospitalier universitaire Sylvanus Olympio (ChuSo), l’émissaire allemand s’est ensuite rendu à l’Institut national d’hygiène où il a offert, au nom de son pays, des équipements médicaux comme des respirateurs et des oxymètres. Des appareils d’une utilité importante destinés aux centres hospitaliers régionaux et universitaires (Chr et Chu). Au total, 30 respiratoires et de 5000 oxymètres ont été offerts au Togo de la part de l’Allemagne.
Si les togolais doivent gratitude et reconnaissance à l’État fédéral d’Allemagne pour son appui, cela amène, de l’interne, à se poser de bonnes questions. En effet, en optant appuyer le secteur de la santé au Togo, l’Allemagne s’inscrit dans une démarche plus pragmatique que l’État togolais. Ceci, en apportant de l’oxygène à un secteur pourtant vital mais laissé pour compte, depuis des années déjà.
Conséquence d’une politique sanitaire embryonnaire
En effet, c’est un secret de polichinelle que le secteur de la santé est moins pris en compte dans les priorités de l’État. Ce qui s’explique par la moindre attention des gouvernants aussi bien, pour la vitalité de ce secteur socioprofessionnel qu’au bien être des acteurs qui l’animent. Un mépris du Gouvernement qui aura conduit, courant 2013, face au constat de démission de fait des autres organisations de praticiens, vieillots tant dans leur démarche que dans leur conception et perception de la lutte syndicale, à la création du syndicat des praticiens hospitaliers du Togo (Synphot). À ce jour, les moindres acquis, de ces dernières années, dans ce secteur sont, fort heureusement, l’œuvre de ces vaillants hommes et femmes, débonnaires, solidaires et désintéressés dont le seul souci est de travailler inlassablement, de manière à rendre aux togolais, leur dignité humaine.
Malheureusement, le chantier étant encore vaste, cette lutte citoyenne semble encore bien loin de solder une situation sociale très exsangue, due essentiellement à une politique sanitaire presque inexistante.
À ce jour, les centres de santé sont bien vétustes et pauvres en plateaux techniques à travers le pays. Ceci, ajouté à une police d’assurance inclusive qui ne soutient malheureusement que les plus forts de la société, notamment les fonctionnaires et leurs ayant droits. Pendant que les plus vulnérables sont toujours laissés pour compte. Lesquels, face à une condition sociale des plus misérables et malheureuses, n’ont de recours, en cas de maladie, qu’aux médicaments de rue. Ces drogues qui se muent en «mal nécessaire» que semble combattre pourtant le gouvernement. Aujourd’hui, si le fameux projet d’extension de l’assurance maladie à toutes les couches sociales se veut une solution palliative à ce déficit de gouvernance, le manque de confiance en l’État rend encore plus sceptiques les populations.
La leçon de Berlin à Faure
C’est donc, au regard de tout ce qui précède que le choix de l’Inh est loin d’être anodin. Fondé en 1967 par l’Etat et la coopération allemande, ce centre par excellence d’analyse au Togo n’existe visiblement que de nom. Car, faisant face à la pauvreté criarde de son plateau technique, tout comme les autres centres de santé du pays. Une pauvreté complètement mise à nu par la crise sanitaire qui a laissé toute l’opinion publique pantoise, face à l’inexistence du moindre respirateur. Encore moins de scanner, ne ce serait-ce que dans les centres de santé universitaire, à défaut de ceux régionaux.
Indispensables. Pour gérer les formes sévères du covid-19 qui se manifestent par le syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), c’est grâce à la Covid que les togolais peuvent s’estimer heureux de disposer aujourd’hui de quelques respirateurs dans leur centres de santé. Une commande qui n’est pourtant qu’une affaire d’une dizaine de milliards FCFA. Une ardoise pour la bonne cause, largement supportable pour le budget de l’État. Ceci, quand on sait surtout que des individus peuvent facilement se tailler, sur la base des combines, des centaines de milliards FCFA, rien que sur la commande publique du pétrole au Togo, dans le dos du contribuable.
Une attitude qui frise le mépris voire l’indifférence qui, en réalité, ne surprend guère, quand on sait qu’au moindre malaise, les dirigeants sautent dans le premier avion pour se faire traiter on Occident. Et c’est fort, de tout point de vue, que cette démarche de Gerd Muller se veut une autre leçon de gouvernance administrée au pouvoir de Faure qui fait vraisemblablement du secteur de la santé, son dernier souci. Par ce geste, Berlin montre visiblement la voie à Lomé comme pour lui enfoncer dans le tympan , qu’aucun développement n’est possible sans un système sanitaire performant. Ouf, Vivement que le message passe cette fois-ci.
FRATERNITE