Lorsque souvent, nous prenons soin d’inviter nos gouvernants à faire les choses avec méthode, rigueur et professionnalisme, en évitant de tricher les gens par l’usage de la force ou par abus d’autorité, d’aucuns ont tendance à penser que nous exagérons. Et bien voilà, le pays vient, encore une fois, d’en payer gravement le prix à l’international.
En effet une procédure de saisie immobilière sera bientôt lancée par le groupe Accor sur un hôtel particulier situé dans le 16ème de Paris appartenant à l’État du Togo.
La cause en est toute simple, l’État doit à ce groupe, la bagatelle de 4 millions d’euros, suite au litige qui opposait les deux parties et qui a été tranché par la Chambre de Commerce International de Paris.
Voici les faits:
En juillet 2014, le Togo avait expulsé le groupe Accor, gérant de l’hôtel Mercure Sarakawa suite à une décision de justice de notre pays qui établissait le constat que les clauses du contrat de bail n’étaient pas respectées par le gérant.
Contestant avec véhémence à la fois la saisine du tribunal de Lomé que l’arrêt rendu, le groupe a, à son tour, saisi la Chambre de Commerce International qui a rendu son verdict en 2020 condamnant le Togo à verser la somme de 4 millions d’euros au groupe au titre des dommages et intérêts.
Car le pays, semble-t-il, n’a pas respecté les dispositions impératives du traité de l’OHADA et la justice togolaise aurait dû logiquement se déclarer incompétente pour connaitre d’un tel dossier.
Analyse
Les faits reprochés au groupe Accor, à savoir le non investissement pour rénover l’hôtel ainsi que le non renouvellement de bail, sont sans doute avérés. Mais une chose est d’établir le constat et une autre est d’avoir la bonne méthode pour tirer profit de cette situation. Dès l’instant où le Togo avait d’imbattables arguments pour coincer ce groupe, pourquoi a-t-il manqué de saisir le tribunal compétent pour trancher le litige?
Sans doute que les gens ont dû se dire que ce serait trop long, et puisque certains magistrats togolaise sont sous la botte des dirigeants, autant les utiliser en urgence pour vider le dossier et chasser rapidement ces « emmerdeurs ».
Patatras, ce groupe étant lui-même puissant et ayant les moyens de se faire entendre au plan international, n’a pas hésité à coincer le pays et ainsi avoir gain de cause.
L’immeuble qui vaut aujourd’hui au moins 10 millions d’euros, situé dans un quartier huppé de Paris, sera ainsi saisi, à moins pour le Togo, de verser près de 2,5 milliards qu’il doit désormais à ce groupe.
Imaginons simplement que tous ceux qui, au plan interne, sont souvent victimes des abus de notre justice, avaient eux aussi les moyens de saisir des tribunaux à l’international, ce sera la catastrophe pour le pays. Car toutes les fois où le Togo a été traîné devant des tribunaux internationaux pour une raison ou une autre, c’est toujours le revers pour le pays. Est-ce à dire que notre pays manque de magistrats compétents pour exercer la justice avec rigueur et professionnalisme? Assurément pas!
Le problème réside précisément dans cette velléité que le politique a de toujours se mêler des dossiers judiciaires en exerçant une influence malsaine sur certains magistrats.
La conséquence malheureusement, retombe sur tout le peuple puisque justement, ce sont ses biens qui sont saisis à l’étranger. Dommage !
Luc Abaki