Togo, Élections locales et Décentralisation : L’Allemagne et l’UE insistent sur l’accélération et la transparence du processus


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L’Union des Communes du Togo (UCT) a organisé les 22 et 23 septembre derniers, les 12e Journées nationales des Communes du Togo autour du thème : « Décentralisation et développement local : contribution des Partenariats Publics-Privés ». Cette 12e édition des journées coïncide avec les 20 ans d’existence de l’UCT créée le 31 mai 1996 à Nangbéto, occasion pour des principaux ambassadeurs européens dans notre pays de revenir sur la question de la décentralisation.
Infog : 27avril.com
 
« La JNCT 2016 fera la synthèse des actions en cours au Togo, dans le cadre de la promotion du développement économique local, en lien avec l’amélioration de la mobilisation et la gestion des finances locales », a déclaré à l’ouverture, le Contre-Amiral Fogan Adegnon, président en exercice de l’UCT. « Elle servira de cadre au plaidoyer en faveur de la prise en compte des collectivités territoriales dans les réformes visant à promouvoir les partenariats publics et privés, pour le développement économique, social, environnemental et culturel du Togo », a ajouté le président de la délégation spéciale de la commune de Lomé.
 
Mais comment parler de collectivités locales, dans le contexte actuel togolais, sans évoquer la question de la décentralisation ? Si les officiels togolais ont, eux préféré la passer sous silence, les diplomates européens ont saisi l’occasion pour l’évoquer une fois encore. Tour à tour, les ambassadeurs d’Allemagne, de France et de l’Union Européenne, se sont prononcés sur l’avancement du processus de décentralisation dans notre pays.
 
L’Allemand n’a pas caché son impatience par rapport au processus. « Il est nécessaire que le gouvernement donne un fort signal sur sa volonté de vouloir conduire le processus en toute transparence et dans de bons délais. La feuille de route de la décentralisation et des élections locales existante exige des réformes et ajustements qui nécessitent une décision politique palpable avec une communication empreinte d’indicateurs de progrès concrets, à l’atteindre étape par étape, afin que tous les acteurs puissent ressentir l’avancement du processus de la décentralisation », a particulièrement insisté Christophe Sander, représentant de l’Etat allemand au Togo, ajoutant que « Les élections locales donneront un coup de pouce incontournable à toute tentative de faire évoluer les collectivités territoriales économiquement et bien sûr à la gestion transparente des affaires locales ».
 
Dans son plaidoyer au profit des collectivités locales, l’Allemand sera rejoint, quelques minutes plus tard, par l’Espagnol qui représente l’Union Européenne au Togo. « Au-delà de la dimension politique liée aux élections locales, au-delà de leurs dimensions économiques, je voudrais profiter des occasions que vous m’offrez pour partager un message strictement opérationnel. En 2007, des projets financés par l’UE démarrent dans 8 villes du Togo (Atakpamé, Dapaong, Tsévié, Sokodé, Kara, Notsè, Aného et Lomé) et portent sur l’accès à l’eau potable ou à l’assainissement, la construction de latrines, la gestion de déchets ou la prévention d’inondation. Ce projet pour un montant total de plus de 44,5 milliards de F CFA, oui 44,5 milliards de F CFA, représente plusieurs années de budget de gestion et d’investissement des villes concernées. Nous ne pouvons pas fermer les yeux face à l’évidence des conditions extrêmement difficiles dans lesquelles fonctionnent aussi bien les institutions déconcentrées de l’Etat que les institutions décentralisées », a soutenu Nicolas Berlanga-Martinez.
 
« L’UCT a 20 ans. Il faut préciser que l’UCT est plus âgée que la moyenne d’âge de votre population. Vous savez qu’au Togo, la moyenne d’âge est à 19 ans. C’est un appel à la réflexion », a-t-il lancé à titre d’interpellation à l’endroit des autorités publiques, une manière de les inviter au pragmatisme et à l’accélération au profit de la population, majoritairement jeune, dont les attentes sont grandes et pressantes.
 
Le Français, sans surprise, semble justifier la situation de quasi-immobilisme. Pour celui qui depuis son arrivée au Togo, ne livre que des discours poétiques qui font la part belle au pouvoir en place, le processus de décentralisation est « en marche » et « avance à son rythme ». A « certains qui le trouveront trop lent », Marc Fonbaustier répond que « c’est lié à l’histoire et à la complexité des enjeux techniques qui le sous-tendent » et invite « l’Union des Communes du Togo à un rôle majeur à jouer : rôle de facilitateur et de régulateur, dans le cadre qui sera fixé par les pouvoirs publics centraux ». Il se félicite que « le montant de la coopération décentralisée française s’élevait à 8 millions de dollars pour l’année 2014 » et indique que « la perspective annoncée d’élections communales au Togo va encore ouvrir de nouvelles possibilités à celles des collectivités locales françaises qui ne peuvent coopérer qu’avec des organes élus ».
 
En dehors des interventions « diplomatiques », il y a eu cette conférence d’ouverture, dépourvue de toute langue de bois ou ton protocolaire, donnée par la Secrétaire générale de l’Association européenne pour la Démocratie locale (ALDA), AntonnellaValmorbida, en présence des officiels. « Dans mon travail, par monts et par vaux, je peux sans aucun doute affirmer que le bon fonctionnement des collectivités territoriales est une œuvre qui n’a pas de contre-indication », a-t-elle lancé en début d’intervention. « La décentralisation et la participation citoyenne sont des instruments qui permettent de résoudre les problèmes de la communauté, de dégager de meilleures solutions, de multiplier les ressources et de faire face, en anticipant souvent, aux conflits. Les ressources ne sont pas seulement financières, mais sont aussi des compétences, du temps et de la détermination, qui changeront la société qui nous entoure. J’ai envie de dire « je participe » donc « je suis », et la participation est plus facile dans le processus local qu’au niveau national », a analysé Mme Valmorbida dont l’association a travaillé pendant 20 ans dans des pays en transition démocratique en Europe et en Afrique du Nord.
 
« Les priorités sont nombreuses, mais la mise en place de la gouvernance locale est un point de départ essentiel sur lequel se construit le reste de la vie démocratique et le développement», a-t-elle mis en exergue, poursuivant que « la mise en place d’un système de décentralisation semble être, sans aucun doute, un des points de départ de la stabilisation ».
 
« Pour le développement de tout le territoire du pays, la décentralisation est nécessaire. Et doit l’être pleinement (pas seulement avec une déconcentration des pouvoirs de l’Etat). Le processus à moitié (sans élection et répartitions des compétences) bloque le vrai essor régional par son aspect de contrôle central et d’éloignement des problèmes locaux », a-t-elle averti, car « si un maire et une équipe n’a pas d’autonomie et de pouvoir et de marge de manœuvre locale (dans un contexte de centralisation), il ou elle ne regardera que vers le niveau national et ne sera responsable qu’envers celui-ci et pas envers les citoyens qui l’ont élu. C’est un pur principe de savoir à qui il faut rendre des comptes : à l’Etat et à son administration (au gouvernement) ou aux citoyens qui peuvent voter au niveau local. Le processus de l’élection locale est donc fondamental ».
 
« Les élections sont la première pierre fondamentale de la démocratie locale, mais ne suffisent pourtant pas. Le vote ne peut être un chèque en blanc pour quatre ou cinq années avec le gage et l’espoir que la chose publique soit bien administrée. La complexité de nos sociétés, et certainement le Togo et Lomé n’en sont pas exclus, nécessite une interaction constante entre les élus et la politique (les prises de décisions) et les citoyens qui sont engagés dans la vie sociale, dans l’éducation, dans l’économie », plaide Antonella Valmorbida.
 
Pour la Secrétaire Générale de l’Association européenne pour la démocratie locale, « ces quelques mots valent au Togo, à Paris, à Berlin, à Rabat ou dans tous les autres pays du monde : la démocratie n’est pas un vain mot, mais elle n’a de sens que par la possibilité d’offrir une société meilleure pour nous et nos enfants ». Un appel lancé aux autorités togolaises représentées à l’occasion par le ministre en charge de l’Administration territoriale et de la Décentralisation et des Collectivités locales.
 
Source : Maxime Domegni, L’Alternative No. 558 du 27 septembre 2016
 

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