Le voyage tant attendu a enfin eu lieu. Les trompettes se sont tues. Le quotidien du Togolais lambda est resté le même. Et pourtant, on avait pensé que ce déplacement impacterait l’avenir du Togo. Au final, juste un accord, une convention de financement, un protocole d’accord et une déclaration d’intention. Et même l’électrification tant brandie permettra plutôt à des entreprises françaises de rapatrier les financements consentis. Une manière pour les entreprises françaises de reprendre de la main gauche, ce que Faure Gnassingbé a cru décrocher comme retombées de son séjour.
C’est le site de la présidence qui illustre le mieux le bilan de la moisson du chef de l’Etat lors de son séjour en France présenté comme du graal.
« Le Togo et la France ont signé quatre accords au cours de la visite présidentielle. Un accord de financement pour le déploiement de 50 mille lampadaires solaires par la société Sunna Design avec un financement français de 40 millions d’euros, une convention de financement avec l’Agence française de Développement (AFD) dans le cadre du projet PERECUT pour électrifier 50 villes du pays pour un montant de 75 millions d’euros, un protocole d’accord sur le dispositif «Talents en commun», visant à mobiliser les compétences de la diaspora pour un accompagnement sur les métiers du digital et une déclaration d’intention pour la mise en œuvre du projet de « convergence Energie-Digital » consistant au déploiement de la fibre optique sur le réseau électrique togolais », peut-on lire.
Quand on recherche la raison du choix de cette entreprise, le même site apporte la réponse. « Sunna Design, une entreprise française spécialisée dans l’éclairage public solaire et autonome, déploiera au Togo 50 000 lampadaires solaires. Un accord a été signé dans ce sens la semaine dernière à Paris, lors de la visite du Président de la République en France ».
50.000 lampadaires solaires à déployer pour l’éclairage public, et 50 villes (ou villages c’est selon) à électrifier, quoi de plus louable. Mais encore faut-il que les contours de ces deals cadrent avec les réalités togolaises.
Les lampadaires solaires fonctionnent à base d’énergie solaire accumulée dans des batteries ou accumulateurs. Ceux-ci ont une durée de vie qui n’atteint pas 10 ans et devront être changés ou recyclés. La jeunesse togolaise a-t-elle la compétence pour s’approprier ce système d’éclairage pour qu’après installation, la maintenance et le transfert de compétences soient assurés par les Togolais ? Ou alors les autorités se tourneront encore vers « le colon » pour contracter d’autres prêts pour ces travaux ? Les accumulateurs étant produits par des sociétés, l’implantation d’une filiale de ces sociétés serait un plus tant pour la jeunesse en termes de création d’emplois, que pour les autorités. Autrement, la France reprendra de la main gauche ce qu’elle a donné de la main droite.
Mais revenant aux retombées proprement dites, la circonspection est plus que de mise. Surtout à moins de deux ans de la fin du Plan national de développement (PND). « Mettre en place un hub logistique d’excellence ; Développer des pôles de transformation agricole, manufacturiers et d’industries extractives ; Consolider le développement social et renforcer les mécanismes d’inclusion » sont les trois axes déclinés dudit plan. Et le Togo doit rassembler près de 4.622 milliards FCFA dont 65% devront être financés par le secteur privé.
A ce jour, aucun bilan de parcours, aucun chiffre quant au niveau de mobilisation des fonds nécessaires pour lancer le développement du Togo. Or le pays est à moins de 20 mois du bouclage du PND. Certainement qu’on usera de gymnastiques et d’acrobaties propres au terroir pour prolonger le délai d’exécution du PND. Soit ! Mais par rapport au défi du PND, était-il nécessaire « d’organiser une fête » autour d’un voyage dont le bilan n’en est pas un ?
C’est l’occasion pour dire que les vraies raisons de ce voyage sont ailleurs et que le satisfécit affiché par la présidence togolaise ressemble plus à une cantate qu’à autre chose. Malheureusement, on n’en saura jamais plus quant aux « autres accords » qui « devraient en outre intervenir bientôt, fruits des différentes entrevues avec les patrons d’entreprises français », pour reprendre les écrits du site.
Godson K.
source : Liberté