Faure Gnassingbé joue à cache-cache et se réfugie derrière l’Assemblée nationale


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Réformes / Rencontre avec Jean-Pierre Fabre
 
. A ses interlocuteurs : « Le Togo n’est pas le Burkina (…) Est-ce que je peux aller aux élections ? »
 
Faisant suite à un courrier à lui adressé par Jean-Pierre Fabre, le chef de file de l’opposition, Faure Gnassingbé a accepté recevoir ce dernier. La rencontre a eu lieu ce samedi 22 novembre 2014 au Palais de la Présidence. Du retour fait par le candidat du Combat pour l’alternance politique en 2015 (Cap 2015) et sa délégation au cours d’un point de presse organisé au siège de la Convention démocratique des peuples africains (Cdpa) juste après la rencontre qui aura duré une heure – Fabre blaguera que lui et Faure font des progrès en matière de discussions -, le moins que l’on puisse dire, c’est que le locataire du Palais de la Marina est resté énigmatique sur la question des réformes qui a été le menu principal des échanges. Ses interlocuteurs ont trouvé un homme braqué, mais visiblement gêné par la problématique et qui leur quémande presque la légitimité afin de se présenter au scrutin de l’année prochaine.
 
Faure dit « espérer le consensus » à l’Assemblée
 
C’est suite à un courrier à lui adressé par Jean-Pierre Fabre pour l’interpeller sur la situation politique heurtée du pays, particulièrement sur l’urgence des réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales nécessaires pour la transparence et l’apaisement du scrutin de l’année prochaine, et dans lequel il a sollicité une audience que Faure Gnassingbé a accepté le recevoir ce samedi. Et il y était au nom du Cap 2015, accompagné de deux autres leaders de cette alliance électorale, Mme Brigitte Adjamagbo-Johnson de la Cdpa et Me Abi Thessa du Pacte socialiste pour le renouveau (Psr).
 
A en croire M. Fabre lors du point de presse organisé au siège de la Cdpa pour faire le compte-rendu de la rencontre, lui et sa délégation ont relevé à leur interlocuteur que « l’histoire se précipite », que « c’est lui qui détient la clé du problème » des réformes. Ils pensaient ainsi pouvoir lui arracher une concession ou une décision forte sur le sujet de l’heure. Mais Faure Gnassingbé est resté énigmatique. Pour toute réponse, il a laissé entendre « qu’il espère que le consensus va se faire » à l’Assemblée nationale lors des discussions sur la proposition commune de loi de réformes introduite par les députés de l’opposition portée par le Cap 2015 et le duo Car-Addi. Faure Gnassingbé se réfugie donc derrière un hypothétique compromis entre le pouvoir et l’opposition. Une façon insidieuse de refuser ces réformes, sachant bien que le consensus est presqu’impossible, son camp cherchant à arracher à l’opposition un passe-droit devant lui permettre de se présenter au scrutin de 2015 ; ce que ne veut concéder pour rien au monde cette dernière. « Nous avons insisté que le chef de l’Etat pèse pour que les réformes se fassent », a souligné Jean-Pierre Fabre.
 
Une mendicité tacite de légitimité
 
« Nous sommes allés dans les détails, mais ce n’est pas tout que je vais dévoiler ici », a laissé entendre à un moment du point de presse, Jean-Pierre Fabre qui était manifestement réservé. Et dans notre quête d’en savoir plus que ce qui a été rapporté publiquement, une source proche du Cap 2015 nous a révélé d’autres pans assez intéressants de ces échanges.
 
Selon donc les indiscrétions, c’est un Faure Gnassingbé braqué et sur la défensive, les empêchant d’aller au bout de leurs idées et leur arrachant même la parole que ses invités ont vu. « Vous voulez toujours imposer votre point de vue sans en avoir les moyens (…) Le Togo n’est pas le Burkina », a-t-il craché à la figure de ses interlocuteurs. Entre les lignes, Faure Gnassingbé fait simplement référence aux institutions de la République et à l’armée qu’il a de son côté.
 
« C’est quoi les réformes ? Est-ce que je peux aller aux élections (de 2015, Ndlr) ? (…) On va me répondre que c’est la Cour constitutionnelle qui va interpréter », a-t-il dardé au sujet des réformes qui semblent le sujet qui le braque. Et à ses interlocuteurs de lui rétorquer que la Cour constitutionnelle ne va pas interpréter, mais « appliquer la loi ». Ces mots (« Est-ce que je peux aller aux élections ») sont simplement révélateurs de la gêne qu’il éprouve à se présenter au scrutin de l’année prochaine et constituent une requête tacite adressée à l’opposition pour lui accorder une dérogation et ainsi légitimer son éventuelle candidature. La stratégie a été déjà essayée dans le cadre des discussions relatives au projet de loi du gouvernement, et c’est le refus des députés de l’opposition de lui concéder ce passe-droit qui a poussé les élus de l’Union pour la Répondre à rejeter le texte le 30 juin dernier. En un mot, Faure Gnassingbé quémande la légitimité auprès de ses opposants.
 
Relativement à son fameux souhait de consensus pour la mise en œuvre des réformes, il nous revient que ses interlocuteurs lui ont rappelé qu’il n’y en pas eu lors de la modification de la Constitution en 2002, malgré les prescriptions de l’Accord cadre de Lomé. Et à Faure Gnassingbé de les surprendre en déclarant : « C’était une erreur », mais que la procédure était légale. Et pourtant il veut en profiter ! Ses hôtes lui ont tout même signifié que « la seule légalité ne suffit plus aujourd’hui », et qu’il faut la légitimité.
 
La question de la marche du Cap 2015 réprimée la veille s’est aussi invitée aux échanges. « Vous avez été dispersés parce que vous avez refusé le point de chute qu’on vous a proposé », a craché Faure Gnassingbé à Jean-Pierre Fabre et sa délégation qui lui demandaient si c’était responsable pour un Etat d’organiser une contre-manifestation. Et de répéter la phrase témoin de sa logique résolue de la force : « Vous voulez imposer votre point de vue sans en avoir les moyens ».
 
La mobilisation continue pour les réformes
 
C’est le message qu’ont tenu à faire passer les leaders du Cap 2015, devant ce jeu de cache-cache manifeste de Faure Gnassingbé qui montre toute sa mauvaise foi à mettre en œuvre les réformes. « Aussi longtemps que les réformes ne seront pas faites, nous manifesterons (…) Nous ne voyons pas les élections se faire sans les réformes. On espère que le chef de l’Etat prendra la mesure des enjeux afin que notre pays n’aille pas à la dérive », a déclaré Me Abi Tchessa, le leader du Psr, qui a ajouté, parlant de ces réformes, qu’il devrait y avoir « les grands équilibres de la Constitution de 1992 ». Même son de cloche chez le Coordonnateur du Collectif « Sauvons le Togo », Me Zeus Ajavon, qui a laissé entendre que même si des discussions ont lieu entre les acteurs politiques, au niveau des Organisations de défense des droits de l’Homme (Oddh), ils continueront à mettre la pression et n’arrêteront les manifestations que lorsque ces réformes seront obtenues.
 
Jean-Pierre Fabre a profité de l’occasion pour appeler les populations à répondre massivement à la marche prévue le 28 novembre prochain par les Oddh, tout en remerciant les populations pour la « forte mobilisation » de vendredi passé qui, a-t-il relevé, est l’effet motivant de la dynamique unitaire scellée par le Cap 2015. A l’en croire, il y a eu quatre (04) blessés graves et quelques manifestants interpellés.
 
En outre, le sort des militants de l’Alliance nationale pour le changement (Anc) toujours incarcérés dans l’affaire des incendies ainsi que les inculpations qui pèsent encore sur les leaders du Cst ont été aussi évoqués. Mais pas de réponse probante de la part de Faure Gnassingbé.
 
Tino Kossi
 
source : Liberté Togo
 

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