Plusieurs sociétés « exercent l’activité de collecte de fonds du public et d’octroi de crédit ou proposent des services financiers en ligne et d’e-commerce, de marketing de réseau, des transactions de crypto¬monnaies, de courtage, de conseils en investissements boursiers, de trading et des produits… » en toute illégalité, c’est par ces termes que le ministre Sani Yaya sonnait l’alerte et le glas sur les sociétés opérant dans le Trading au Togo, en mars 2021. Et entre autres sociétés, sont citées celles de Global Trade Corporation S.A.S., CACESPIC-IF Togo Sari, Prosperity Investment Corporation (PIC) S.A, la Société de Négoce et de Courtage en Banque (SNCB), Leader Bureau Chymall-Sairui Groupe Togo, Alliance in Motion Global, Chy Century Heng Hue, QNET, J-Global Capital International S.A.U, TIENS, TIMEX TRADING, Aladin Groupe, Petronpay Togo, Black empire, High Life International, Global Building Investment and Trade (GLOBIT), Global Investment Trading (LIYEPLIMAL), qui sont dans la foulée sommées de cesser « leurs activités financières et monétaires, ainsi que de conseil sur toute l’étendue du territoire et de procéder aux remboursements, sans délai, des sommes collectées auprès des adhérents, sous peine de poursuite pénale ». Et pour l’autorité, « ces structures exercent en toute illégalité et ne sont pas autorisées à collecter des fonds auprès du public contre des titres de capital ou de placement ». Dénonçait-il au passage le fait qu’« elles proposent des gains mirobolants et flatteurs pour susciter l’engouement de la population à ces produits, l’exposant ainsi à un risque élevé de perte de l’épargne constituée durant tant d’années d’efforts ».
Du décryptage de ce communiqué par lequel le ministre Sani Yaya sommait ces sociétés de cesser leurs activités, il n’est en aucun moment indiqué ou cité quelque texte de la République togolaise interdisant le Trading. Mais finalement, que reproche-t-on aux sociétés de Trading dont les responsables sont finalement arrêtés à tour de bras, surtout ceux encore qui étaient sur le territoire national au moment du lancement de l’offensive ? Et un petit tour vite fait dans les textes économiques du Togo ainsi que des organisations de la sous-région ne mentionne une certaine illégalité de l’activité même de Trading. Dans nos sollicitations, un responsable de l’APSFD approché n’a pas pu donner des indications précises sur des textes de la législation togolaise qui encadre ou encore qui sanctionnent les acteurs qui s’adonnent au Trading.
Rapportant une explication d’un responsable de structure de microfinance, interrogé sur le sujet, il a indiqué que « le Trading c’est une activité légale qui est à part. Le Trading c’est le commerce extérieur, le Trading ce sont les activités boursières c’est légal, le Trading n’est pas la microfinance, il a sa loi à part. Ils étaient contre le Trading parce que les traders spolient l’épargne des populations, les gens prennent leur dépôt pour aller investir et dire qu’ils sont en Trading ». Une explication aux allures d’accusation, comme on pouvait le constater.
Et si ces structures dont les activités sont suspendues alors qu’ils n’avaient pas encore de problème de paiement de ce qu’ils avaient promis aux souscripteurs, ne sont pas habilitées, selon le communiqué du ministre parlant de légalité, quelles sont donc les structures habilitées à faire le Trading ? Ou mieux encore, que reproche-t-on aux sociétés de Trading qui se sont créées ici et là et dont parfois certains responsables politiques ont même associé leurs images dans le cadre de leurs activités ? Ce sont là quelques interrogations.
L’interlocuteur fait savoir que « le Trading est une activité légale mais les gens mêlent le placement illicite dedans, ils trompent les gens qu’ils vont aller placer sur les marchés boursiers alors que ce sont des sociétés de ponzi, ceux qui arrivent premièrement qui encaissent les dépôts de ceux qui arrivent après. Quand il n’y a pas beaucoup d’entrées, le système s’étouffe et la masse ne peut pas récupérer son dépôt. La microfinance et le Trading sont deux activités indépendantes ».
Il incrimine au passage le fait que « les placements à risque, les sociétés pyramidales ou ponzi sont universellement proscrites », que « le Trading est légal mais les sociétés font de la finance pyramidale sous prétexte du Trading » et donc, qu’elles « trompent les gens en fait ».
A ces réactions, on n’aura pas finalement de réplique de la part de ces responsables de Trading vu que la plupart sont actuellement sous les verrous, du moins ceux qui sont connus, et que ceux qui sont dans l’anonymat ont préféré le rester et ne pas s’oser répondre à nos sollicitations, le risque étant grand désormais de s’affirmer ainsi.
Toutefois, on peut comprendre à suffisance que ce n’est plus un procès de Trading qui est fait aux responsables de ces sociétés mais plutôt de faire dans le marketing de réseau ou système Ponzi. Vrai ou faux ?
A chacun d’en faire sa petite idée, vu que de nos enquêtes de journaliste, on a pu voir des images où des responsables politiques ont associé leurs images à certaines activités de ces responsables de sociétés de Trading qui sont aujourd’hui traités comme des pestiférés. Ne savaient-ils pas au départ qu’ils étaient dans le faux ? N’avaient-ils pas menés leur investigation sur eux avant d’accepter associer leurs images ?
Nous reviendrons dans une prochaine livraison sur les implications que cette affaire de Trading et ses pesanteurs pourront avoir sur la liberté d’expression et la liberté économique et si possible sur une liste d’adhérents pour faire constater comment le politique a renforcé dans un premier temps la confiance des populations ou souscripteurs en ces sociétés dont les pertes sont aujourd’hui estimées entre 20 et 25 milliards de F cfa.
LTT N°102 du Vendredi 22 Octobre 2021